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Peut-il vraiment y avoir un consensus scientifique?

Peut-il vraiment y avoir un consensus scientifique?

On parle souvent de consensus scientifiques mais est-ce que ça veut dire que tout le monde est d'accord?

« Il n’y a pas de consensus des scientifiques sur les changements climatiques, la preuve, une lettre signée par des scientifiques qui que le climat ne se réchauffe pas. »

 Sous diverses formes, cet argument revient périodiquement depuis 20 ans.

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Dès qu’on parle de changements climatiques, l’expression « consensus scientifique » n’est jamais loin. On a aussi beaucoup utilisé cette expression pendant la pandémie, et elle rôde régulièrement dans les milieux qui luttent contre la désinformation en science. Pourtant, l’expression est souvent mal comprise.

Voici trois sources fréquentes de confusion.

1) « Consensus scientifique » nest pas synonyme de « unanimité »

Les scientifiques doivent publier leurs recherches dans des revues scientifiques. Dès lors, d’autres scientifiques peuvent lire ces recherches, les analyser, les commenter et, parfois, tenter de les reproduire. D’autres études sur le même sujet seront donc publiées. Et si elles arrivent à la même conclusion, cest grâce au cumul de ces recherches que des consensus scientifiques s’établissent. Autrement dit, quand la majorité des recherches pointe toujours dans la même direction, on peut dire qu'il y a consensus.

Mais il est bien ici question d’études publiées, et non d’opinions. Car la base de la construction d’un savoir en science ne repose pas sur les croyances d’un ou de plusieurs scientifiques, mais plutôt sur l’accumulation des études sur un sujet. Par exemple, chaque fois quon entend, à propos du climat, le fameux chiffre « 97 % des scientifiques sont daccord », on fait référence à 97 % des scientifiques qui ont publié une étude sur le réchauffement climatique.

Lorigine de ce pourcentage est une recherche de lhistorienne des sciences de lUniversité Harvard, Naomi Oreskes, en 2004 : sur 928 études publiées par des climatologues et contenant les mots-clés (en anglais) « global climate change », aucune n’était en désaccord avec le consensus sur la responsabilité humaine dans le réchauffement climatique. Depuis 2004, au moins 14 compilations similaires sont arrivées à des totaux variant entre 91 % et 100 %, tout dépendant du niveau dexpertise retenu pour figurer dans la compilation.

Non seulement y a-t-il donc consensus sur la responsabilité humaine, mais ce consensus aurait de surcroît augmenté entre 1991 et 2011, selon une de ces compilations.

Mais ce n’est pas 100%, et c’est une des deux raisons pour lesquelles on dit que consensus n’est pas synonyme de « unanimité ».

Cest en vertu de cette même définition quon a coutume de dire que l’évolution des espèces vivantes fait consensus parmi les biologistes, ou que le caractère cancérigène du tabac fait consensus parmi les oncologues.

2) Un scientifique et un expert, ce n’est pas la même chose

Mais rien de tout cela n’empêche qu’on peut toujours trouver des scientifiques qui, ici et là, continuent de nier ces faits : ils le font presque toujours sur la base de leurs opinions.

De surcroît, il faut observer qui ils sont : la plupart du temps, ce sont des scientifiques provenant d’autres disciplines, qui n’ont aucune expertise sur le cancer, l’évolution ou le climat.

C’est important de le rappeler, parce que la science s’est énormément spécialisée au cours des derniers siècles. Résultat, ce n’est pas parce que quelqu’un détient un diplôme universitaire en science qu’il est expert en tout, ni que son opinion est supérieure à celle du premier quidam venu!

Ainsi, les climatosceptiques aiment bien brandir de temps en temps des « lettres » ou des « pétitions » signées par plusieurs scientifiques qui nient le réchauffement climatique. Or, quand on observe les signatures, il sagit chaque fois de gens qui nappartiennent pas au domaine ciblé.

3) Le consensus ne s’étend pas à tous les aspects d’un sujet

Souligner qu’il y a consensus scientifique sur le fait que la Terre se réchauffe et que l’humain en est largement responsable, ça ne veut pas dire que la recherche sur le réchauffement climatique est terminée!  Par exemple, un débat subsiste sur les ouragans : y en aura-t-il plus à cause du réchauffement, ou autant qu’aujourd’hui, mais plus puissants?  Autre exemple d’incertitude : il est difficile de prévoir les impacts qu’aura le réchauffement planétaire sur un pays en particulier, ou sur une région précise.

Prendre conscience de cette réalité permet souvent de recadrer un débat : on ne devrait jamais inviter sur un plateau de télé un expert mondial en climatologie et un « scientifique » qui nie le réchauffement climatique. Par contre, on pourrait inviter deux experts en météorologie de notre région qui ont des opinions contrastées sur les conséquences attendues (canicules, précipitations, sécheresses…) ou sur les façons de s’y préparer.

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