Par Kathleen Couillard
En septembre 2025, l’administration Trump déclarait que la prise d’acétaminophène (Tylenol) serait responsable de la hausse des cas d’autisme depuis les années 2000. Cette affirmation qui a fait sursauter la communauté scientifique cite quelques études qui auraient fait un lien entre l’utilisation de ce médicament par les femmes enceintes et le développement de l’autisme.
Je crois que cette controverse est une bonne occasion d’aborder un concept qui est trop souvent mal compris: la différence entre une corrélation et un lien de cause à effet.
Qu’est-ce qu’une corrélation?
Le mot « corrélation » est la façon scientifique de dire qu’on observe un lien entre deux phénomènes. Par exemple, si je me mesure la consommation de crème glacée et le port de lunettes de soleil, je risque de constater que les deux augmentent de la même façon pendant les mois d’été.
Est-ce que cela signifie que manger de la crème glacée rend les yeux plus sensibles à la lumière et pousse donc les gens à porter des lunettes de soleil? Vous serez certainement d’accord avec moi que cette explication ne fait aucun sens!
Dans ce cas, l’apparente association entre la crème glacée et les lunettes de soleil est due à un troisième élément : le soleil. C’est ce que les scientifiques appellent un « facteur confondant », c’est-à-dire un facteur qui n’est pas à l’étude, mais qui influence le phénomène qu’on mesure.
Des preuves insuffisantes
C’est ce qui différencie la corrélation de la causalité. Alors que la corrélation décrit seulement un lien entre deux phénomènes qui pourrait être le résultat d’un autre facteur inconnu, la causalité signifie que l’un provoque directement l’autre. On parle aussi de lien de cause à effet.
En raison des facteurs confondants, certaines études ne peuvent toutefois pas prouver un lien de cause à effet. C’est le cas des études d’observation. Dans ces études, les scientifiques observent un phénomène, sans intervenir. Ils se contentent de le décrire.
Revenons à l’exemple de l’autisme. La plupart des études sur le sujet comparent des enfants avec ou sans diagnostic et cherchent des caractéristiques qui les distinguent. Certaines de ces études ont ainsi noté que les mères qui avaient utilisé du Tylenol pendant leur grossesse étaient plus nombreuses dans le groupe des enfants avec un diagnostic d’autisme que dans l’autre.
Cette observation n’est toutefois pas suffisante pour prouver un lien de cause à effet puisque plusieurs raisons pourraient expliquer le lien entre le Tylenol et l’autisme. Par exemple, certaines mères prennent peut-être plus souvent du Tylenol parce qu’elles sont porteuses d’un gène qui les prédispose à faire des migraines. Étant donné, la forte composante génétique de l’autisme, cette différence génétique pourrait jouer un rôle dans son développement. D’autres femmes pourraient aussi avoir pris du Tylenol pour combattre une fièvre causée par un virus qui aurait pu modifier le développement du cerveau du bébé.
Comment prouver un lien de cause à effet?
Pour prouver un lien de cause à effet, les scientifiques doivent utiliser des études bien spécifiques : les essais contrôlés randomisés. Dans ce type d’étude, on divise, au hasard, les participants en deux groupes. Un groupe reçoit le traitement et l’autre reçoit un placebo. La seule différence entre les deux étant le traitement, si les chercheurs constatent une différence, cela signifie que c’est bien le traitement qui est en cause.
Cependant, de telles études ne sont pas toujours possibles. Dans le cas du Tylenol, on s’imagine mal obliger des femmes enceintes à prendre le médicament et l’interdire aux autres.
Cela nous ramène donc aux études d’observations qui sont la seule façon d’étudier de façon éthique un phénomène comme l’autisme. Heureusement, l’analyse statistique permet de tenir compte des facteurs confondants pour diminuer leur impact. Par exemple, en 2024, une nouvelle étude sur l’autisme a contrôlé plus sérieusement des facteurs comme l’environnement familial. Ce faisant, les chercheurs ont constaté que l’association entre l’autisme et le Tylenol avait disparu. Ils ont donc montré que cette corrélation n’était pas synonyme de causalité.
Image : daboost | DepositPhotos.com
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